Violence en EMS: frappée par un résident, elle se fait licencier par son employeur

Genève, le 22 février 2022

Clara (prénom d’emprunt), 57 ans, aide-soignante depuis plus de 10 ans dans un EMS se fait violemment agresser par un résident en juin 2021. Des conséquences de cette agression, elle devra se faire opérer. Déchirure de ligaments, épaule gelée, Clara est encore en arrêt des suites dues à la violence inouïe qu’elle a subie. Mais alors qu’elle récupère de son opération, elle reçoit une lettre de licenciement de son employeur. Explications.

Aide-soignante à la Résidence Notre Dame, Clara travaille régulièrement dans des équipes en sous-effectif pour soigner les personnes âgées. C’est à nouveau le cas, ce jeudi 10 juin 2021, lorsqu’elle se retrouve seule avec une collègue pour un EMS de 7 étages et de 80 résident-e-x-s. Impossible donc de demander de l’aide quand Monsieur X, connu pour son comportement violent, sonne le personnel. Arrivée dans sa chambre, Clara découvre que Monsieur X s’est souillé et doit être changé. Après l’avoir nettoyé, elle l’aide à s’habiller et se retrouve accroupie pour lui enfiler ses chaussettes. C’est alors que Monsieur X commence à la rouer de coups de poing. Celle-ci ne peut quitter la chambre au risque que Monsieur X fasse une mauvaise chute. Sa conscience professionnelle coûtera chère à Clara. Monsieur X continue de la cogner, à tel point qu’elle devra d’abord se rendre chez le médecin, son épaule pleine d’hématomes ne permettant pas des examens dans l’immédiat. Ce n’est que plusieurs jours plus tard que l’on découvrira les déchirures ligamentaires qui nécessiteront une opération.

Plusieurs mois passent, Clara a l’épaule « gelée » selon les termes de son médecin et ne peut même plus faire de physiothérapie. Elle doit laisser son épaule totalement au repos, ce qu’elle fait, espérant se remettre au plus vite pour reprendre son travail. Mais le 7 décembre, la Résidence Notre Dame lui envoie une lettre de licenciement, signalant qu’elle a dépassé son délai de protection. En clair, l’EMS n’a que faire que l’incapacité de travail de Clara soit causée par une violente agression d’un résident survenue dans une situation de sous-effectif patent. L’employeur ne se pose ni la question du retour au travail de Clara ni du besoin ou non d’un poste adapté, voire d’un reclassement professionnel, tout ce qui l’intéresse c’est de se débarrasser au plus vite d’une employée en arrêt de travail. Peut-être aussi tout bonnement parce que cette employée est déléguée syndicale dans l’EMS et que l’employeur la trouve un peu trop revendicative à son goût.

Quoi qu’il en soit, ce licenciement pose très directement plusieurs questions. D’abord celle de la dotation en personnel des EMS. Comment assurer les soins de 80 résident-e-x-s avec seulement deux aides soignantes ? Même si cette situation n’a lieu qu’à certaines heures de la journée, elle reste hautement problématique, tant pour le personnel que pour les personnes âgées. Ensuite, celle du comportement inqualifiable de l’employeur qui interroge sur son aptitude à gérer dans ce canton trois EMS abondamment financés par les deniers publics. Peut-on laisser le sort de nos aîné-e-x-s et de celles et ceux qui s’en occupent entre les mains de gestionnaires aussi cyniques ?

Clara et Avenir Syndical demandent expressément au Département de M. Poggia d’intervenir dans cette situation, afin d’une part de contrôler la dotation des soins dispensés à la Résidence Notre Dame et dans les deux autres EMS gérés par la même direction, et d’autre part de faire annuler ce licenciement scandaleux.